Ville de Nevers - Décembre 2000
Je préfère les seconds rôles...
Il a quelque chose de
Entre poésie et esprit pop, jazz et swing, nostalgie et audace, ce parisien rêveur
déploie un répertoire inimitable, petit bijou d’inventaire en forme de
bestiaire! Eternel adolescent, il sera sur scène à Nevers le 5 décembre
prochain à 20h45.
Thomas, faut-il en employant
votre prénom, prononcer à tout prix le “ s ” ?
J’ai remarqué cela aussi. Beaucoup disent Thomas en insistant sur le s. A vrai
dire, je ne vois pas pourquoi… Il n’y a aucune raison, ce n’est pas une
fantaisie de ma part. Ma foi, si ça plaît aux gens, ça ne me dérange pas. On va
dire que ça fait plus joli !
Dans le passé, vous faisiez du
rock plutôt hard, vous êtiez même punk. Comment peut-on à ce point changer d’univers
musical ?
En changeant soi-même. Aujourd’hui j’ai 37 ans, j’ai évolué depuis l’adolescence
! J’ai de nouveaux goûts, de nouvelles envies, voilà. En fait il faut un déclic,
et je suis resté longtemps confiné dans ce qui correspond à ma génération ;
mais il ne faut pas croire, je me suis épanoui à l’époque. A présent je
recherche autre chose.
Comment qualifier votre style
? Vous êtes dur parfois avec la chanson française ?
Ah oui, je vois… J’ai tenu parfois des propos un peu secs
au sujet de la
chanson française. C’était surtout pour être
insolent. (rires) Mais après tout,
on ne va pas s’éterniser si les temps changent, si la
chanson française n’est
plus ce qu’elle était ! En France, on a bien
abandonné le Gaulois il y a des siècles,
et personne ne s’en souvient aujourd’hui. Il faut regarder
devant. Ceci dit, j’ai
un peu exagéré des fois… La chanson
française, j’en ai hérité quand même.
A l’école
communale, je découvrais et j’aimais les chansons
paillardes. Et de la bonne
chanson, lorsqu’on m’a initié, m’est venu le
goût des rimes, le besoin d’écrire
sur le temps présent et sur ce qu’on voit dans les rues,
aussi. En gros, je
fais de la chanson paillarde, au sens noble du terme, paillarde et pas
réaliste.
Est-il facile d’écrire des
mots simples ?
Non justement. Il faut de la technique. Avec le vocabulaire de tous les jours,
il faut beaucoup réduire, puis faire revenir. Ce qui m’intéresse, c’est
finalement de ne garder que l’essentiel. A mon avis, les mots de la vie
quotidienne sont les plus efficaces, les plus drôles. J’ai souvent un départ de
chanson autobiographique, puis progressivement le sujet se dilate, et l’histoire
s’invente.
A propos d’histoires, les vôtres
parlent beaucoup d’animaux ? Pourquoi ?
Je trouve l’imagerie animalière plus parlante. Plutôt que d’écrire sur deux
individus, un fort et un faible, je préfère utiliser l’image du lion et du
moucheron. Comme ça les gens comprennent plus vite. Par le biais des animaux,
on peut avoir une conversation universelle. Les animaux apparaîssent d’ailleurs
depuis la nuit des temps dans toutes les cultures. En chansons, ça donne des
petites fables… Et puis on ne réalise pas assez l’omniprésence des animaux dans
notre langage courant. Ne dit-on pas sans arrêt, frais comme un gardon, gai
comme un pinson, un ours mal léché ou un temps de chien ?
Votre dernier album “ Qu4tre ”
est-il celui de la maturité, comme le disent les journaux ?
Sans doute, puisque je suis plus mûr qu’il y a trois ans ! Enfin j’espère… Ce
sera toujours le cas jusqu’à ce que je retombe en enfance ! Il est vrai que
pour ce disque, j’ai repris presque tous les arrangements, j’ai veillé à tous
les détails. En principe, jusqu’à l’enregistrement, on retouche les
arrangements. Après, on ne bouge plus rien, tout est écrit, et sur scène tout
est joué, les lignes mélodiques, les contrechants…
Vous passez peu à la radio, très
peu à la télé. Est-ce un obstacle quand on doit faire la promotion d’un disque
?
Pas vraiment. Il existe d’autres circuits! D’autres publics aussi. Le bouche à
oreille n’est pas désagréable. A la radio, France Inter et RTL suivent de près
ce que fais, c’est sympa. Pour les autres, c’est sûrement que mon univers ne
les intéresse pas. Il faut dire que je ne cherche pas à être compatible ! Je ne
veux pas servir de chausse-pied ; je me sentirais trop à l’étroit dans
certaines émissions.
Vous êtes timide… Pour vous,
qu’est-ce qui paraît le plus dur sur scène ? Parler, bouger, danser ?
Pour éviter le malaise je prépare tout. Tout est joué. Y compris mon personnage
d’anti-chanteur, un peu maladroit. Et puis j’aime bien mettre en lumière les
seconds rôles, ceux qui occupent souvent une place inconfortable, ceux que le
public ne connaît pas assez… les bidasses, les domestiques, les assassins !
(rires)
Où en est votre actualité ?
Je rentre d’un mois au Québec. A présent, la tournée redémarre en France jusqu’en
décembre. Elle reprendra de février à avril. Puis je retournerai au Québec au
printemps. Un disque ? Oui c’est prévu. Un CD live devrait sortir à l’automne
prochain, avec les meilleurs moments de cette tournée.
Quel est votre plus beau
souvenir de scène depuis 1993 ?
Franchement c’est difficile de répondre. La scène, c’est hors du temps. L’Olympia,
oui, c’était impressionnant ! Mais ailleurs, il y a eu des soirs de fête
terribles ! Ca dépend aussi de l’humeur du public. Tenez par exemple, la
semaine dernière, à Clermont-Ferrand, on a eu un accueil formidable. Après le
concert, on a été dans un bar, on a rejoué pour les gens tard dans la nuit.
Si vous étiez un livre ?
Le Petit Robert. Non pas que je connaisse toute sa science mais enfin…
Si vous étiez une chanson ?
Elle est épatante cette petite femme-là !